C’est une scène qui fait grincer des dents et soulève une onde d’indignation dans une République démocratique du Congo meurtrie. Ce mercredi 9 juillet 2025 lors de la messe dite en rapport avec la sacralisation du bienheureux Bwana Chui, Corneille Nangaa, ancien président de la CENI et aujourd’hui figure controversée de la scène politico-militaire congolaise, a reçu la bénédiction solennelle de trois hauts prélats de l’Église catholique.
Mgr Fulgence Muteba, archevêque de Lubumbashi et président en exercice de la CENCO, Mgr Willy Ngumbi, évêque de Goma, et Mgr Léonard Kakudji, évêque de Kamina, ont tour à tour imposé les mains sur un homme dont l’ombre s’étend aujourd’hui sur les exactions de l’Alliance Fleuve Congo (AFC), groupe armé allié au M23, accusé de massacres, de viols, de pillages et de déplacements forcés de populations dans l’Est du pays.
Alors que les rapports de l’ONU, de la MONUSCO et des ONG locales s’accumulent, documentant les atrocités commises par les miliciens de l’AFC, cette bénédiction pose une question brûlante : l’Église catholique bénit-elle aujourd’hui, par action ou par omission, un homme que beaucoup accusent d’être l’un des architectes du chaos dans le Nord-Kivu ?
Corneille Nangaa, devenu l’allié politique du M23 à travers l’AFC, a plusieurs fois nié tout lien direct avec les violences. Pourtant, ses appels à « libérer le pays par les armes » ont largement circulé sur les réseaux sociaux. Son agenda, porté par des puissances régionales comme l’Ouganda et le Rwanda, est perçu comme une menace directe à la souveraineté congolaise.
Dans ce contexte, voir trois figures majeures de l’Église institution censée incarner la voix morale de la nation lui accorder leur onction publique, fait figure de scandale. Surtout quand on sait que la CENCO elle-même avait, il y a à peine quelques mois, condamné fermement l’agression rwandaise et appelé à la paix.
Ce geste soulève de profondes interrogations sur la posture actuelle de l’Église catholique dans un pays dont une partie est en quête de la paix . Neutralité stratégique, tentative d’apaisement, ou aveuglement politique ? Les Congolais, eux, observent avec amertume ce qui ressemble à une trahison silencieuse.
Car pendant qu’on bénit Nangaa à goma, à Rutshuru, on enterre encore les victimes de l’AFC.
Berm’s Bamba